JEANNE D'ARC, MISTERE EN CINQ ACTES ET DIX-HUIT TABLEAUX
Shakespeare disait à Ben Jonson : « Trouvant la nation généralement fort ignorante de l’histoire, j’ai écrit mes pièces historiques pour instruire le peuple » ; et Southey, qui, le premier, détruisit avec Coleridge la légende anglaise de Jeanne, écrit dans les Premières impressions littéraires de sa jeunesse : « Tout ce que je savais de l’histoire d’Angleterre, je l’avais appris dans Shakespeare. »
Aujourd’hui, ne pourrait-on pas dire de nous ce que Shakespeare disait des Anglais de son temps ? Qu’est-ce que, le peuple sait de l’histoire de France ? La prise de la Bastille et quelques menus faits de la Révolution; et, dans la classe élevée, qu’est-ce que les nouvelles générations apprendront de Jeanne d’Arc ? Les mensonges des Thalamas et des Anatole France.
De là, l’impérieux besoin de pièces historiques, ressuscitant les faits tels qu’ils se sont accomplis, dans une évocation vivante qui saisisse les foules et soit l’éveil rédempteur de notre pays. Car le théâtre compris de la sorte ne saurait se borner à l’enseignement de l’histoire; il doit être une école de patriotisme. M. Edouard DRUMONT, dans son article de la Libre Parole du 5 août dernier, admettait parmi les causes secondaires de la Révolution, cette éducation, fruit de la Renaissance, « où les jeunes Français, nourris de l’histoire grecque et romaine, ignoraient tout des origines de notre histoire nationale et des chansons de gestes de nos aïeux. » Depuis 1793, les choses se sont encore aggravées ; sous l’effort persistant des Juifs et des francs-maçons, le drapeau est insulté, et la patrie pour laquelle combattit Jeanne, n’excite plus les impatiences de la revanche, ni les enthousiasmes des gloires évanouies. Un théâtre national peut seul lutter efficacement contre l’internationalisme. Le, peuple s’y retrempera dans l’amour de la France, bien moins entamé qu’on ne le croit ; et une pièce patriotique, comme celle de Jeanne d’Arc, peut sonner la charge pour « bouter dehors » les ennemis du dedans, ou les envahisseurs, de quelque côté qu’ils franchissent nos frontières.
Un jeune auteur, M. Joseph BOUTEYRE, conclut avec Tivier que Jeanne d’Arc n’a pas encore eu de poète, parce que sa mission surnaturelle n’a pas été comprise. « Cette mission surnaturelle, dit-il, a été de ramener la France à ses traditions chrétiennes, lui apportant, au nom de Dieu, la délivrance avec l’obligation de reconnaître son roi, Jésus-Christ. Si telle est la vérité historique, comment concevoir une épopée en dehors de cette vérité ?